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LES FOULES DE LOURDES

dentelles des images pieuses. Il y en a aussi de défraîchis, de très vieux, qui se pointillent, comme des nez, de tannes et des faux, des cierges déshonnètes dupant l’acheteur et larronnant Dieu, des cierges dont la tige de stéarine est enroulée dans une couche de cire qui pleure des larmes jaunes, tandis que le milieu se fond en ce liquide vitreux dans lequel baigne le pédoncule grillé des simples bougies.

Ici, c’est là-rebours de la Pentecôte, les langues embrasées montent vers le ciel et n’en descendent pas ; mais elles prient le Paraclet sous la forme même qu’il adopta ; elles jouent le rôle des exorations liturgiques qui implorent le Seigneur avec les phrases mêmes dont ses Préfigures se servirent ; et si l’on se rappelle la liturgie du temps de la Pentecôte où presque partout l’eau apparaît, associée au feu, l’on saisit la mystérieuse alliance des deux éléments, l’accord de la flamme et de l’onde, à Lourdes.

Celle floraison de feu, elle a, pour la cultiver, un vieux jardinier qui vit, là, à demeure, et tourne, rissolé, devant le foyer de la grotte, un vrai jardinier avec son tablier bleu, à poches, sa face rase, ses outils de jardinage, sa serpette, son râteau, sa pelle, sa brouette devenue un wagonnet.

Du matin au soir, sans se presser, il fait, silencieux, le ménage de la Vierge, râclant les stalactites