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guettes, scandaient leurs boniments avec des raflaflas de tambour, désignant des enseignes qui se ressemblaient toutes. Toutes, en effet, étalaient sur le champ de sinople et de gueules de gigantesques berdouilles aux seins comme des boules d’haltères, aux jambes comme des tours, et tous ces monstres avançaient sur un coussin vermeil l’énorme jambon de leurs cuisses, et des tambours-majors, des médecins décorés, des maréchaux en grand uniforme les entouraient et paraissaient surpris.

Anatole soutint qu’il valait mieux aller voir une étrangère qu’une française. Ce serait plus curieux. Son avis prévalut et tous les quatre entrèrent dans le palais de la belle Brabançonne.

Colombel et Anatole exultaient à l’idée qu’ils tâteraient une formidable jambe, Céline surveillait son homme qu’elle savait volage, Désirée allait simplement assouvir une curiosité.

La femme reposait sur une estrade, élevée de deux marches ; elle avait une robe verte, outrageusement décolletée, deux globes comme des ballons roses, trois fausses lentilles près des tempes. Elle se leva, dit qu’elle était originaire de Bruxelles, qu’elle était âgée de vingt-deux ans, tendit le bras au-dessus du shako d’un pioupiou qui lui regardait, extasié, l’aisselle, et finit sa petite histoire par la phrase consacrée : — Je vous