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aux Folies-Bobino. La discussion avait duré tant qu’ils étaient en quête de chandelles ; une fois redescendus dans la cave et occupés à décroûter le tas des rognures et des maculatures pour les mettre en sac et les peser, la querelle avait recommencé et s’était close par la soigneuse tripotée qu’Auguste avait reçue.

Ce fut le contre-maître qui raconta l’histoire à Désirée ; elle revint tremblante s’asseoir à sa place.

Sa première pensée fut celle-ci : C’est un batailleur, ah bien merci alors ! Et puis, en admettant même qu’Auguste n’aimât pas à chercher noise à ses compagnons, quand on écope une pareille raclée, on est ou un homme pas brave ou un homme pas fort ; et elle se trouvait humiliée d’avoir un amoureux qui, contraint à se battre, ne roulait pas les autres. Puis, cette paupière gonflée lui fit peine, elle avait envie de pleurer ; Auguste ne disait rien, mais ça devait lui faire bien mal ! Il devait avec cela être joliment gêné ! Elle se figurait combien c’était vexant pour un homme de se montrer à celle que l’on aime dans un tel état ! Elle en vint à songer enfin au sourire goguenard du contre-maître lorsqu’il lui avait avoué qu’Auguste avait emprunté de l’argent pour promener sa belle. — Au fait, elle avait peut-être eu tort ; elle devait bien savoir qu’il