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intensité de vie furieuse, à un rendu d’impression inouï. Il était élève de Cabanel et de Gérôme, mais ces deux perclus avaient en vain essayé de lui inculquer la pacotille de leurs formules. Il avait au plus vite craché sur ces rapiotages ; il avait fait escale aussi chez les paysagistes en renom. Ils avaient poussé des cris de détresse devant ses théories. Ses vues de barrières, ses jardins de la rue de la Chine, ses plaines des gobelins, ses guinguettes à vices, ses sites souffreteux et râpés l’avaient fait honnir. Ayant même déclaré, un jour, que la tristesse des giroflées séchant dans un pot lui paraissait plus intéressante que le rire ensoleillé des roses ouvertes en pleine terre, il s’était fait fermer la porte des ateliers honnêtes.

Il va sans dire que Céline n’avait jamais rien compris au caractère d’un homme si excellemment désorganisé. Lui, la prenait pour ce qu’elle valait. Elle lui plaisait, bien qu’elle fût sans outrance et sans mystérieux ragoût ; mais il avait besoin pour un tableau d’une fille populacière, râblée, solide, d’une goton lubrique, propre à vous tisonner les sens à chaque enjambée. Il méprisait avec raison ces modèles qui vautrent leurs nudités lavées du matin, dans l’atelier de chaque peintre. La Vénus de Médicis, pour se servir de son expression, lui semblait imbécile ; il n’ad-