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des plateaux etc des verres ; à la gauche d’Auguste, un homme allumait sa bouffarde et, levant les yeux au ciel, soufflait des bulles de fumée tout en époussetant les grains de tabac épars sur sa culotte ; l’on entendait les cris des joueurs de piquet : dix, du trèfle, vingt, du carreau ! Puis l’abominable cliquetis des dominos qu’on secoue ; un monsieur, assis sur une chaise, se penchant en avant, écartait les jambes et crachait, un soldat de la ligne, avec une chaîne d’argent attachée à la première boutonnière de sa capote, hurlait à tue-tête : — Alphonse, un bock ! Puis il y eut un abatis de soucoupes, l’appel d’un chien, le bonjour d’un buveur qui, retourné sur son tabouret, saluait des doigts un nouveau venu et se remettait aussitôt le nez dans ses cartes. Auguste avait pris la main de Désirée et il la serrait doucement. — Elle le laissait faire, ahurie par la clameur des voix. Lui craignait de la pincer avec ses bagues en cornaline et en argent. — Elle se réveilla. — Oh ! Que j’ai les pattes sales, dit-elle en retirant sa menotte ; mais Auguste la retenait, soutenant qu’elle mentait et que c’étaient les siennes qui étaient sales. — Ah dame ! Quand on travaille, ajouta-t-il, on ne peut avoir des doigts de papier glacé, — et il lui raconta une chose bien curieuse. Il était passé dernièrement par la rue Neuve des Petits-Champs et il avait vu à la