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dirigent vers un bal ouvert dans la pointe de l’île. Quelques crincrins, un piston qui glapit, parfois une flûte qui piaule ; mais le paradis et l’Atlantide rêvés par ces employés militaires ne sont pas là. Ce bal est surtout fréquenté par les calicots de Paris, et les danses, comme dans toutes les banlieues, du reste, y sont décentes. On valse un peu, on polke les genoux en charnière et les bras en anse, mais le quadrille modéré manque de piment et d’entrain. Puis les soldats n’y sont point adorés comme ils le souhaitent ; aussi profitent-ils des permissions de nuit pour se rendre dans la Terre promise de l’Intendance, dans le Chanaan de Grenelle. Là, ils triomphent sans mesure, abasourdissent de leurs grâces déhanchées les tabatières, dominent le bal de la Brasserie européenne dont ils rançonnent l’amour comme en