Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/7

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


I



À Chartres, au sortir de cette petite place que balaye, par tous les temps, le vent hargneux des plaines, une bouffée de cave très douce, alanguie par une senteur molle et presque étouffée d’huile, vous souffle au visage lorsqu’on pénètre dans les solennelles ténèbres de la forêt tiède.

Durtal le connaissait ce moment délicieux où l’on reprend haleine, encore abasourdi par ce brusque passage d’une bise cinglante à une caresse veloutée d’air. Tous les matins, à cinq heures, il quittait son logis et pour atteindre les dessous de l’étrange bois, il devait traverser cette place ; et toujours les mêmes gens paraissaient au débouché des mêmes rues ; des religieuses courbant la tête, penchées toutes en avant, la coiffe retroussée, battant de l’aile, le vent s’engouffrant dans les jupes tenues à grand’peine ; puis repliées en deux, des femmes ratatinées dans leurs vêtements, les serrant contre elles, s’avançaient, le dos incliné, fouettées par les rafales.

Jamais, il n’avait encore vu, à cette heure, une per-