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suivant les saisons et suivant les jours, inerte et vivante à la fois, ne s’animant qu’aux orgues mugissantes des vents, déformant le toit mouvant de ses branches, au moindre souffle ; elle était inconsistante et souvent taciturne, sujette absolue des brises, serve résignée des pluies ; elle n’était éclairée, en somme, que par un soleil qu’elle tamisait dans les losanges et les cœurs de ses feuilles, ainsi qu’entre des mailles de carreaux verts. L’homme, en son génie, recueillit ces lueurs éparses, les condensa dans des rosaces et dans des lames, les reversa dans les allées des futaies blanches ; et même par les temps les plus sombres, les verrières resplendirent, emprisonnèrent jusqu’aux dernières clartés des couchants, habillèrent des plus fabuleuses splendeurs le Christ et la Vierge, réalisèrent presque sur cette terre la seule parure qui pût convenir aux corps glorieux, des robes variées de flammes !

Elles sont surhumaines, vraiment divines, quand on y songe, les cathédrales !

Parties, dans nos régions, de la crypte romane, de la voûte tassée comme l’âme par l’humilité et par la peur, se courbant devant l’immense Majesté dont elles osaient à peine chanter les louanges, elles se sont familiarisées, les basiliques, elles ont faussé d’un élan le demi-cercle du cintre, l’ont allongé en ovale d’amande, ont jailli, soulevant les toits, exhaussant les nefs, babillant en mille sculptures autour du chœur, lançant au ciel, ainsi que des prières, les jets fous de leurs piles ! Elles ont symbolisé l’amicale tendresse des oraisons ; elles sont devenues plus confiantes, plus légères, plus audacieuses envers Dieu.