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Ce monument minuscule si on le compare à de grandes cathédrales, était marqué de l’étampe flamande ; il en avait le côté paysan et bonhomme, et la foi gaie ; c’était un sanctuaire sans façon, bien peuple ; l’on avait dû s’y entretenir avec la Vierge noire encore debout sur un autel, de ses petites affaires, l’on avait dû y vivre, y prier à la bonne flanquette, ainsi que chez soi, sans gêne.

Mais il ne fallait pas se fier à l’aspect bénin et réjoui de cet édifice, car les rangées de grotesques courant au-dessus du porche et au-dessus des arcatures, démentaient la sécurité joviale des alentours.

Ils étaient là, réparés, il est vrai, ou refaits, grimaçant en des lignes serrées, jaillissant de la pierre en un pêle-mêle de religieuses démentes et de moines fous, de terriens ahuris et de villageoises cocasses, de coquebins tordus par un rire nerveux et de diables hilares ; et, au milieu de cette horde de réprouvés hurlant hors des murs, surgissait, entre deux démons qui la tourmentaient, une figure réelle de femme, s’élançant de la frise, tentant de se ruer sur vous. Les yeux dilatés, hagards, les mains jointes, elle vous supplie, terrifiée, désigne le lieu saint et vous crie d’entrer ; et l’on s’arrête, interdit, devant ce visage décomposé par la peur, crispé par l’angoisse, qui se débat dans cette meute de monstres, dans ces visions irritées de larves. Farouche et charitable, à la fois, elle menace et elle implore ; et cette image d’une éternelle excommuniée, chassée du temple et réléguée à jamais sur son seuil, vous hante comme un souvenir de douleur, comme un cauchemar d’effroi.

Non, à coup sûr, il n’existe, dans la ménagerie satanique