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Huchés sur des colonnes torses, ils pressaient sous leurs pieds restés nus, en signe d’apostolat, les bourreaux de leurs supplices. Ils avaient des cheveux longs et diffus, des barbes bifides, taillées en fourche, hormis le saint Jean imberbe, et saint Paul qui, selon la tradition, était chauve ; et ils étaient, tous, vêtus de même, drapés dans des manteaux à plis ménagés en d’adroites ondes. Seul, Jacques le Majeur se dénonçait par une pannetière semée de coquillages, pareille à celle des pèlerins qui le visitaient à Compostelle, dans l’un des grands sanctuaires édifiés en son honneur, au Moyen Age.

Il était le Saint vénéré de l’Espagne, mais a-t-il jamais évangélisé ces contrées, ainsi que l’attestent saint Jérôme, saint Isidore et le Bréviaire de Tolède ? d’aucuns en doutent. En tout cas, au XIIIe siècle, son histoire, narrée par Durand de Mende, se résumait en ceci : envoyé dans ce pays pour convertir les idolâtres, il échoua dans cette mission et regagna Jérusalem où Hérode le fit décapiter. Son cadavre fut ensuite transporté en Espagne et ses reliques y opérèrent ces conversions qu’il n’avait pu effectuer de son vivant.

D’ailleurs, songea Durtal, nous sommes singulièrement peu renseignés sur les Apôtres. Presque tous n’apparaissent qu’à la cantonade dans les Evangiles et sauf quelques uns, comme saint Pierre, saint Jean, saint Paul, dont les silhouettes parfois se déterminent, les autres flottent à l’état d’ombres, passent en quelque sorte voilés dans ce halo de lumière qu’épand autour de lui le Christ ; et après sa mort, ils s’effument davantage encore et leur existence n’est plus délinéée que par de vagues légendes.