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d’âne, de jambes de cerf, d’un poitrail de fauve, d’une tête de chameau armée de dents terribles — le tharande qui, d’après Hugues de Saint-Victor, a la taille d’un bœuf, le profil du cerf, le pelage de l’ours et change de couleur, ainsi qu’un caméléon ; enfin le moine de mer le plus déconcertant de tous, car Vincent de Beauvais l’enseigne, son buste couvert d’écailles et muni, en guise de bras, de nageoires hérissées de crocs, meut un chef tonsuré de moine dont le bas s’effile en museau de carpe.

Le Bestiaire en a encore inventé d’autres, ne fût-ce, par exemple, que ces gargouilles, ces créatures hybrides matérialisant les vices vomis, rejetés du sanctuaire, rappelant au passant qui les voit expumer à pleine gueule les lies des gouttières, qu’hors de l’Eglise, ce ne sont que gémonies de l’esprit et cloaques d’âme ! Mais, se dit Durtal, en allumant une cigarette, ce dessus du panier me paraît suffire ; d’ailleurs, au point de vue symbolique, cette ménagerie est peu intéressante, car tous ces monstres, wivre, manicore, léoncrotte, tharande, moine de mer, ne diffèrent point ; tous incarnent l’Esprit du Mal.

Il tira sa montre. Allons, reprit-il, j’ai encore le temps, avant de dîner, de parcourir la série des animaux authentiques ; et il feuilleta la liste des volatiles.

Le coq, fit-il, est la prière, la vigilance, le prédicateur, la Résurrection, car, le premier, il se réveille dès l’aube ; le paon qui est doté, suivant un vieil auteur, « de voix de diable et de queue d’ange », est un réceptacle d’idées contradictoires. Il implique l’orgueil, l’immortalité, selon saint Antoine de Padoue, et aussi la vigilance, à cause des yeux qui parent ses plumes ; le pélican est la figure de la contemplation, et de la charité ;