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II


Depuis trois mois déjà, Durtal habitait Chartres.

Revenu de la Trappe à Paris, il vécut dans un état d’anémie spirituelle, affreux. L’âme gardait la chambre, se levait à peine, traînait sur une chaise longue, somnolait dans la tépidité d’une langueur que berçait encore le ronronnement de prières toutes labiales, d’oraisons se dévidant comme une machine détraquée dont le déclic part seul et qui tourne d’elle-même dans le vide, sans qu’on y touche.

Quelquefois cependant, pris de révolte, il parvenait à se tenir, à arrêter l’horlogerie déréglée de ses suppliques et il essayait alors de s’examiner, de se voir d’un peu haut, d’embrasser, d’un coup d’œil, les perspectives confuses de son être.

Et devant ses demeures d’âme perdues dans les brumes, il songeait à une étrange association des Révélations de Sainte Térèse et des contes d’Edgar Poë.

Les salles de son château interne étaient vides et froides, cernées, de même que les chambres de la maison Usher, par un étang dont les brouillards finissaient par