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devant lui, l’allée basse de la nef, au bout de laquelle, on apercevait, ainsi qu’en un fond de tunnel, la lumière du jour — malheureusement, car elle permettait de distinguer de hideuses peintures, des scènes célébrant la gloire ecclésiale de Chartres : la visite de Marie de Médicis et de Henri IV à la Cathédrale, Louis XIII et sa mère, M. Olier présentant à la Vierge les clefs du séminaire de Saint-Sulpice et une robe brochée d’or, Louis XIV aux pieds de Notre-Dame de Sous-Terre ; par une grâce du ciel, les autres fresques semblaient mortes, se diluaient, en tout cas, dans l’ombre.

Mais ce qui était vraiment exquis, c’était de se rencontrer seul avec la Vierge qui vous regardait de sa noire figure sortant de la nuit, lorsque les mèches des veilleuses crépitaient, dardant des jets de flammes brèves.

A genoux devant Elle, Durtal se déterminait à lui parler, à lui dire :

J’ai peur de l’avenir et de son ciel chargé et j’ai peur de moi-même, car je me dissous dans l’ennui et je m’enlise. Vous m’avez toujours mené par la main jusqu’ici, ne m’abandonnez pas, achevez votre œuvre. Je sais bien que c’est folie de se préoccuper ainsi du futur car votre Fils l’a déclaré : « à chaque jour suffit sa peine », mais cela dépend des tempéraments ; ce qui est facile aux uns est si difficile pour les autres ; j’ai l’esprit remuant, toujours inquiet, toujours aux écoutes, et, quoi que je fasse, il bat la campagne à tâtons et il s’égare ! Ramenez-le, tenez-le près de vous en laisse, bonne Mère, et accordez-moi, après tant de fatigues, un gîte !