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son identité est incertaine, rien ne nous autorise à la fixer.

En tout cas, ainsi que je viens de vous l’attester, l’une et l’autre sont des hérauts de la Vierge dans les Ecritures ; pour Joseph, persécuté, vendu, captif puis sauveur providentiel d’un peuple, il préordine le Christ.

Durtal s’arrêtait devant ce jeune homme imberbe, aux cheveux bouclés et coupés en rond. Il était vêtu d’une cotte, sous une housse brodée autour du col et il tenait, immobile, un sceptre. On eût dit d’un très jeune moine, humble et simple, si avancé dans la voie mystique qu’il l’ignore. Cette statue était certainement un portrait et l’on pouvait assurer qu’un délicat et candide novice avait servi de modèle à l’artiste ; c’était une œuvre d’âme chaste et joyeuse, bien à part. Celui-là, plus encore que le Saint Jean, quel rêve, hein ? fit Durtal, en regardant l’abbé qui approuva d’un geste et reprit :

— Les cordons des voussures sont inaccessibles, car il faut se démancher le cou pour les contempler ; d’ailleurs, l’art qu’ils décèlent n’exalte point. Seuls, les sujets valent. Ils renferment, — outre une série d’anges qui brandissent des astres et des torches, — les hauts faits prophétiques de Gédéon ; les annales de Samson qui, prisonnier au milieu de la nuit, arrache les portes de Gaza et sort de la ville, de même que le Christ brise les portes de la mort et sort, vivant, de sa tombe ; l’histoire de Judith et d’Esther ; celle de Tobie qui est un divin parangon de miséricorde et de patience ; puis nous découvrons dans ce coin, la réplique du portail Royal, les signes du zodiaque et un calendrier de pierre.