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Suivant une autre secte, il n’était ni plus, ni moins, que le Paraclet ; mais, voyons ; à défaut des Ecritures, que révèle la voyance ? La sœur Emmerich en a-t-elle parlé ?

— Elle ne nous apprend rien de net, répondit Durtal. Pour elle, il était une sorte d’ange sacerdotal, chargé de préparer le grand œuvre de la Rédemption.

— C’est une peu l’avis d’Origène et de Didyme qui lui ont, eux aussi, attribué la nature angélique.

— Puis elle l’aperçoit, bien avant l’arrivée d’Abraham, sur différents points déserts de la Palestine ; il ouvre les sources du Jourdain et elle divulgue, dans un autre passage de la vie du Christ, qu’il aurait enseigné aux Hébreux la culture du froment et de la vigne ; bref, elle ne débrouille pas cette indéchiffrable énigme.

Si nous nous plaçons maintenant au point de vue de l’art, Melchissédech est une des bonnes statues de ce porche, poursuivit Durtal ; mais quel masque bizarre a son voisin, Abraham, avec ce visage vu de trois quarts, ces cheveux en herbes couchées, cette barbe fluviale, ce nez allongé qui ne fait qu’un avec le front, descend sans point de suture entre les yeux et simule le mufle d’un tapir, ces joues où pousse une fluxion, cet air, comment dirais-je ? de vague prestidigitateur qui paraît escamoter la tête perdue de son fils.

— La vérité, c’est qu’il écoute l’ordre d’un ange que nous ne distinguons point ; — remarquez en dessous, sur le socle, le bélier dans un buisson et le symbole s’accuse :

Il est le Père céleste qui livre son Fils et Isaac qui porte le bois pour allumer son bûcher, comme Jésus