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dans l’Eglise de Brou, avaient, eux aussi, un sens. Or, il est très certain que ces végétations ont été choisies pour l’élégance tourmentée de leur structure, pour la grâce grêle et maniérée de leurs formes. Autrement, nous avérons que ces ornements relatent une histoire différente de celles que nous narre la botanique de Reims et d’Amiens, de Rouen et de Chartres.

En somme, ce qui s’affirme le plus souvent dans les chapiteaux de notre Cathédrale — qui n’est pas d’ailleurs l’une des mieux fleuries — c’est cette crosse d’évêque qu’imite la pousse naissante de la fougère.

— Bien, mais n’est-elle pas employée dans une intention symbolique, la fougère ?

— Elle est, en thèse générale, le synonyme de l’humilité — ce qui s’explique par ses habitudes de vivre, autant que possible, loin des routes, dans des fonds de bois ; mais si nous consultons le manuel de Sainte Hildegarde, nous apprenons que ce végétal qu’elle dénomme « faru » est une plante magique.

De même que le soleil dissipe les ténèbres, de même, dit l’Abbesse de Rupertsberg, le faru met en fuite les cauchemars. Le Diable l’évite et l’abomine et rarement la foudre et la grêle tombent dans les endroits où elle s’abrite ; l’homme enfin, qui la porte sur lui, échappe aux cantermes et aux charmes…

— Sainte Hildegarde, elle, s’est donc occupée d’histoire naturelle, au point de vue médical et magique ?

— Oui, seulement son livre est inconnu, parce qu’il n’a pas été traduit jusqu’à ce jour. Parfois, elle assigne de bien singulières qualités talismaniques à certaines flores. En voulez-vous des preuves ?