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d’obscurs imbéciles écrivent dans des feuilles que les moniales ne comprennent rien au latin qu’elles lisent ! Il serait à souhaiter qu’ils fussent d’aussi bons latinistes que ces femmes !

L’abbé sourit. — Au reste, poursuivit-il, le secret du chant grégorien est là. Il faut non seulement connaître la langue des psaumes qu’on récite, mais encore saisir le sens souvent douteux, dans la version de la Vulgate, de ces psaumes pour bien les rendre. Sans ferveur et sans science, la voix n’est rien.

Elle peut être excellente, dans les morceaux de la musique profane, mais elle est vide, nulle, quand elle s’attaque aux phrases vénérables du plain-chant.

— Et les Pères à quoi s’occupent-ils ?

— Eux, ils ont d’abord commencé par restaurer la liturgie et le chant de l’Eglise, puis ils ont découvert et réuni dans un « Spicilège » et dans des « Analectes », en les agrémentant d’attentives gloses, les textes perdus de subtils symbolistes et de studieux Saints. A l’heure actuelle, ils rédigent et ils impriment la paléographie musicale, l’une des plus érudites et plus sagaces publications de ce temps.

Mais il ne siérait pas de vous persuader que la mission de l’Ordre Bénédictin consiste exclusivement à fouiller de vieux manuscrits et à reproduire d’anciens antiphonaires et d’antiques chartes. Sans doute, le moine qui a du talent, dans un art quelconque, s’adonne à cet art, si l’Abbé le veut ; la règle est, sur ce point, formelle ; mais le but réel, le but véritable du fils de Saint Benoît est de psalmodier ou de chanter la louange divine, de faire l’apprentissage ici-bas de ce qu’il fera là-haut, de