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s’avisa, un beau jour, pensant qu’il avait moins que les autres épuisé son crédit auprès de Dieu, de l’invoquer pour les causes désespérées, pour les causes perdues, et du poète si compètement ignoré ou si bêtement honni de ces mêmes catholiques auxquels il apportait les seuls vers mystiques éclos depuis le Moyen Age !

Ils furent les malchanceux, l’un de la Sainteté et l’autre de la Poésie, conclut Durtal qui se recula pour mieux voir l’ensemble de la façade.

Elle s’attestait inouïe, avec ses ciselures de flore dessinée sur les carreaux par le gel, avec ses nappes d’Eglise, ses rochets, aux fines mailles, ses guipures en fils de la Vierge, courant jusqu’au premier étage, servant de cadres ajourés aux grands sujets des porches. Puis, elle montait, d’allure érémitique, sobre d’ornements, cyclopéenne, avec l’œil colossal de sa rose morte, entre les deux tours, l’une, fenestrée, niellée comme le portail, l’autre nue comme l’étage qui surplombait le porche.

Mais ce qui dominait, ce qui absorbait Durtal, c’était quand même les statues de Reines.

Et il finissait par ne plus se soucier du reste, par ne plus goûter que l’éloquence divine de leur maigreur, par ne plus les envisager que sous l’aspect de longues tiges baignant dans des tubes guillochés de pierre, s’épanouissant en des touffes de figures embaumant des fragrances ingénues, des senteurs naïves — et le Christ, bénissant, attendri et attristé, le monde, se penchait de son trône, au-dessus d’elles, pour humer le tendre parfum qui s’effusait de ces calices élancés d’âmes !

Durtal songeait — quel irrésistible nécromant pourrait