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Quelle exquise préfiguratrice de la benoîte Mère, que cette Gardienne royale du seuil, que cette Souveraine invitant les égarés à rentrer dans l’église, à s’approcher de cette porte qu’Elle garde et qui est elle-même un des symboles de son Fils ! s’écria Durtal — et il embrassa, d’un coup d’œil, ce vis-à-vis de femmes, si différentes : l’une, plus moniale que Reine, qui baisse un peu la tête ; — l’autre, exclusivement Reine, qui la redresse — la troisième saintement gamine, dont le col n’est ni penché, ni haussé, mais se tient dans la position naturelle, modérant le port auguste d’une Reine, par l’humble et la riante attitude d’une Sainte.

Peut-être, pourrait-on discerner aussi, se dit-il, dans la première, une image de la vie contemplative, comme l’on pourrait alléguer que la seconde implique l’idée de la vie active et que la dernière incarne, ainsi que Ruth, dans l’Ecriture, les deux ?

Quant aux autres statues de Prophètes, coiffés de la calotte juive à côtes et de Rois tenant des missels ou des sceptres, elles sont, elles aussi, indéchiffrables ; l’une d’elles, sise dans l’arche du milieu, au coin de la porte, à droite, séparée par un monarque de la fausse Berthe, intéressait plus spécialement Durtal, car elle ressemblait à Verlaine. Elle en avait la tête plus velue, il est vrai, mais aussi bizarre, le crâne cabossé, le masque un peu épaté, le poil hirsute, l’air commun et bonhomme.

La tradition assigne à cette effigie le nom de Saint Jude ; et elle est suggestive, cette similitude de traits de l’Apôtre le plus négligé de tous par les Chrétiens, de celui qui fut si peu prié pendant tant de siècles, qu’on