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On réquisitionna chez les maçons des perches d’échafaudage ; on jucha à leurs sommets des oriflammes jaunes et bleues et l’on relia ces mâts entre eux par des guirlandes de lierre aux feuilles cousues, les unes sur les autres, par du fil blanc.

Et Chartres épuisé souffla.

Surpris par cet apparat imprévu et par ce simulacre inusité de vie, Durtal s’était rendu au-devant de l’évêque jusqu’à la rue Saint-Michel. Là se dressait, planté sur une grande place, un portant de gymnastique débarrassé de ses trapèzes et de ses anneaux, entouré de branches de sapin, de fleurs en papier d’or et surmonté d’un faisceau de drapeaux tricolores s’écartant en lames d’éventail, sous un bouclier peint, de carton. Cela mimait l’arc de triomphe sous lequel des frères des écoles chrétiennes devaient charrier le dais.

Et la procession qui était allée chercher l’évêque à l’hospice Saint-Brice où, selon un usage séculaire, il couche la nuit de son arrivée dans son diocèse, s’était déroulée sous la pluie fine des cantiques, coupée par l’averse des cuivres que déchaînait une fanfare pieuse.

Lentement, à pas comptés, le cortège défilait entre deux haies de foule massée sur les trottoirs ; partout, les croisées pavoisées de banderoles exposaient des grappes de visages et des corps penchaient séparés au milieu par la balustrade des fenêtres.

En tête, derrière les dos chamarrés de pesants suisses, serpentaient, en deux bandes tenant toute la chaussée, les filles des écoles congréganistes, habillées de bleu cru et voilées de blanc ; puis venaient les délégations des nonnes de tous les ordres installés dans le département :