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incertains qu’il s’agit de convaincre. Et Notre-Seigneur pense qu’il est bon de ramener l’attention sur les bienfaits que répartit sa Mère.

Lasserre n’était plus l’instrument qui pouvait rajeunir la vogue mal épuisée de Lourdes. Le public était saturé de son livre ; il l’avait absorbé sous tous les excipients, sous toutes les formes ; le but était rempli ; l’indispensable outil que fut ce greffier des miracles devait être mis au rancart.

Il fallait maintenant un livre qui différât complètement du sien, un livre qui pût agir sur cet immense public que sa prose de sacristain ne pouvait atteindre. Il fallait que Lourdes pénétrât dans des couches moins malléables et plus denses, dans un public moins plat et plus difficile à contenter. Il était donc nécessaire que le nouveau volume fût écrit par un homme de talent mais dont le style ne fût pas encore assez aérien pour effarer les gens. Et il était avantageux aussi que cet écrivain fût très connu et que ses formidables tirages pussent contrebalancer ceux de Lasserre.

Or, il n’y en avait qu’un dans toute la littérature qui pût remplir ces impérieuses conditions : Emile Zola. L’on en chercherait vainement un autre. Lui seul était apte, avec sa large encolure, ses ventes énormes, sa puissante réclame, à relancer Lourdes.


Peu importait dès lors qu’il niât le surnaturel et s’efforçât d’expliquer, par les plus indigentes des suppositions, d’inexplicables cures ; peu importait qu’il pétrît l’engrais médical des Charcot pour en bétonner sa pauvre thèse ; le tout était que de retentissants débats s’engageassent autour de son œuvre dont plus de cent cinquante