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sortir des cloîtres, la langue liturgique des tons s’altéra ; elle perdit sa raideur initiale et s’assouplit. L’Angelico suivait à la lettre les coutumes de son ordre et il respectait avec le même scrupule les observances de l’art religieux, en vigueur à son époque. Pour rien au monde, il ne les eût enfreintes, car il les considérait ainsi qu’un devoir canonique, ainsi qu’un texte arrêté d’office ; mais dès que les peintres profanes eurent émancipé le domaine de la peinture, ils nous soumirent des versions plus difficiles, des sens plus compliqués et la symbolique des couleurs si simple chez l’Angelico, devint, — en supposant qu’ils en aient toujours tenu compte dans leurs œuvres, — singulièrement abstruse, presque impossible à traduire.

Tenez, choisissons un exemple : Le Musée d’Anvers possède un triptyque de Roger Van der Weyden intitulé : les Sacrements. Dans le panneau central consacré à l’Eucharistie, le sacrifice du Sauveur se consomme sous une double forme, sous la forme sanglante du crucifiement et sous la forme mystique de l’oblation pure de l’autel ; derrière la croix, au pied de laquelle gémissent Marie, Saint Jean et les Saintes femmes, un prêtre célèbre la messe et lève l’hostie, au milieu d’une cathédrale qui sert comme de toile de fond à l’œuvre.

Sur le volet de gauche sont représentés, en de petites scènes distinctes, les Sacrements du Baptême, de la Confirmation, de la Pénitence ; sur le volet de droite, ceux de l’Ordination, du Mariage, de l’Extrême-Onction.

Ce tableau, d’une extraordinaire beauté, assure, avec « la Descente de croix » de Quentin Metsys, l’inestimable gloire du musée belge ; mais je ne m’attarderai pas à vous