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Qu’il y ait de la pénitence, de la coulpe, de la peur sous ces voûtes obscures, sous ces lourds piliers, dans cette forteresse où l’élu s’enferme pour résister aux assauts du monde, cela est sûr — mais cette mystique romane nous suggère aussi l’idée d’une foi solide, d’une patience virile, d’une piété robuste, telle que ses murs.

S’il n’a pas les flamboyantes extases de la mystique gothique qui s’extériorise dans toutes les fusées de ses pierres, le Roman vit au moins, concentré sur lui-même, en une ferveur recueillie, couvant au plus profond de l’âme. Il se résume dans cette phrase de Saint Isaac : « In mansuetudine et in tranquillitate, simplifica animam tuam. »

— Avouez, Monsieur l’abbé, que vous avez un faible pour ce style.

— Peut-être, en ce sens, qu’il est moins agité, plus humble, moins féminin et plus claustral que le Gothique.

En somme, fit le prêtre qui, étant arrivé devant la porte de sa maison, serra la main de Durtal, en somme, il est le symbole de la vie intérieure, l’image de l’existence monastique ; il est, en un mot, la véritable architecture du cloître.

A la condition pourtant, qu’il ne soit pas semblable à celui de Notre-Dame de Poitiers, dont l’intérieur est bariolé de teintes puériles et de tons farouches, car alors, au lieu d’une impression de regret ou de calme, il suscite la pensée de l’allégresse enfantine d’un vieux sauvage tombé en enfance et qui rit parce qu’on a ravivé ses tatouages et qu’on lui a recrépi, avec des couleurs crues, le derme.