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les plus farouches, les flagellations les plus tumultueuses, se ceint la poitrine de chaînes hérissées de pointes, se nourrit de rogatons recrachés sur les assiettes, boit, pour se désaltérer, l’eau des vaisselles, a si froid, un hiver, que ses jambes gèlent.

Son corps est une plaie mais son âme rayonne ; elle vit en Dieu qui la comble de grâces, qui s’entretient doucement avec elle ; sa probation se termine et de même qu’au moment où elle fut postulante, elle gît gravement malade. On hésite à l’accepter à la profession et sainte Térèse intervient encore, ordonne à la Prieure de la recevoir.

Elle prend l’habit, et la tentation de désespoir qui fut le tourment de quelques Saints l’assiège ; puis vient une aridité désolante qui dure trois ans et elle tient bon, éprouve les douleurs de la substitution mystique, subit les plus pénibles, les plus répugnantes des maladies pour sauver les âmes. Dieu consent enfin à interrompre la tâche pénitente de ses maux ; Il lui accorde de souffler et le Démon profite de cette accalmie pour entrer en scène.

Il lui apparaît sous des formes belliqueuses de monstres, casse tout, fuit, en s’effumant dans des buées puantes ; pendant ce temps, un brave homme, Sylvestre Lindermans, veut fonder un Carmel dans une propriété qu’il possède à Oirschot, en Hollande. Comme toujours, lorsqu’il s’agit de planter un monastère, les tribulations abondent ; le moment était mal choisi, d’ailleurs, pour expédier des religieuses dans une ville hostile aux catholiques, au travers d’un pays encombré par les bandes en armes des protestants. Aussi, lorsque sa supérieure la