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des dégâts intérieurs et d’intimes noises ; si l’âme était gourde et contuse, l’esprit n’était, ni moins endolori, ni moins recru. Il paraissait s’être émoussé, depuis son séjour à Chartres. Ces biographies de Saints, que Durtal projetait d’écrire, elles gisaient à l’état d’esquisses, s’effumaient dès qu’il s’agissait de les fixer. Au fond, il ne s’intéressait plus qu’à la Cathédrale, était obsédé par elle.

Puis, vraiment, les vies de Saints, telles qu’elles sont rédigées par les petits Bollandistes, étaient à dégoûter de toute sainteté. Charrié d’éditeurs en éditeurs, des librairies de Paris dans les officines de la province, ce baquet de livre avait été traîné par un seul limonier, le père Giry, puis un cheval de renfort lui avait été adjoint, l’abbé Guérin, et attelés dans le même brancard, ils roulaient, à eux deux, ce lourd camion sur la route défoncée des âmes.

Il n’y avait qu’à décharger le tombereau de ces pesantes proses pour y découvrir, au hasard des bouquins, des phrases de ce gabarit :

« Un tel naquit de parents non moins considérables par la naissance que par la piété, » ou bien dans le cas contraire : « ses parents n’étaient pas illustres par la naissance, mais on voyait briller en eux toutes les vertus dont l’éclat lui est bien préférable. » Puis venait la série des affligeants ponts-neufs :

« Son historien ne fait point difficulté de dire qu’on l’eût pris pour un ange, si les maladies, par lesquelles Dieu le visitait, n’eussent fait voir qu’il était un homme. » — « Le démon ne pouvant souffrir qu’il marchât, à grands pas, dans le chemin de la Perfection,