Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/103

Cette page n’a pas encore été corrigée

voir ! ils pourraient s’attester alors que les imaginations profanes, qui les laissent à d’autres moments, tranquilles, surgissent toujours pendant l’oraison, à l’improviste !

Et puis, à quoi bon disserter ? on réveille les vices assoupis en les regardant. Et il repensa à cette crypte tiède de Chartres. Oui, sans doute, ainsi que tous les édifices de l’ère romane, elle symbolise bien l’esprit de l’Ancien Testament, mais elle n’est pas simplement sombre et triste, car elle est aussi enveloppante et discrète, et si tépide et si douce ! puis en admettant qu’elle soit la lapidaire image du Vieux Livre, ne le représente-t-elle pas alors moins en son ensemble, qu’en un tri bien spécial des grandes Orantes qui préfigurèrent la Vierge dans les Ecritures ? n’est-elle pas la traduction en pierre des pages réservées surtout aux femmes illustres de la Bible qui furent, en quelque sorte, des incarnations prophétiques de la nouvelle Eve ?

Cette crypte reproduirait donc les passages les plus consolants et les plus héroïques du Saint-Livre, car dans ce pieux cellier la Vierge domine ; il lui appartient plus qu’à l’irritable Adonaï, si l’on ose dire.

Et encore est-ce une Vierge très particulière restée forcément en accord avec le milieu qui l’environne, une Vierge noire, rugueuse, trapue, ainsi que la châsse de moëllons qui l’enferme.

Alors elle dériverait, sans doute, de la même idée qui voulut le Christ noir et laid parce qu’il avait assumé tous les péchés du monde, le Christ des premiers siècles de l’Eglise qui endossa par humilité les formes les plus basses. Dans ce cas, Marie aurait enfanté son Fils à sa ressemblance, ayant désiré, Elle aussi, par humilité,