Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/93

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nombre de femmes vont se faire tirer la bonne aventure chez les cartomanciennes.

Le rituel de ces cérémonies était suffisamment atroce ; généralement, on avait enlevé un enfant qu’on brûlait, à la campagne, dans un four ; puis de sa poudre que l’on gardait, l’on préparait avec le sang d’un autre enfant qu’on égorgeait, une pâte ressemblant à celle des manichéens dont je t’ai parlé. L’abbé Guibourg officiait, consacrait l’hostie, la coupait en petits morceaux et la mêlait à ce sang obscurci de cendre ; c’était là la matière du Sacrement.

— Quelle horreur de prêtre ! s’écria la femme de Carhaix, indignée.

— Oui, il célébrait aussi un autre genre de messe, cet abbé ; cela s’appelait… diable, ce n’est pas facile à dire…

— Dites, Monsieur des Hermies, quand on a la haine comme nous ici de telles choses, on peut tout entendre ; ce n’est pas cela, allez, qui m’empêchera de prier, ce soir.

— Ni moi, ajouta son mari.

— Eh bien, ce sacrifice s’appelait la Messe du Sperme !

— Ah !

— Guibourg, revêtu de l’aube, de l’étole, du manipule, célébrait cette messe, à seule fin de fabriquer des pâtes conjuratoires.