Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/91

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— J’ai peur qu’il ne soit trop cuit, dit la femme qui s’intéressait beaucoup plus à son bœuf qu’à ces aventures de l’autre monde ; et elle ajouta l’axiome fameux des ménagères :

Quand le bouillon est bon, le bœuf se coupe mal.

Les hommes protestèrent, affirmant qu’il ne s’effiloquait pas, qu’il était cuit à point.

— Allons, monsieur Durtal, un anchois et un peu de beurre, avec votre viande.

— Tiens, ma femme, donne-nous donc aussi de ces choux rouges que tu as fait confire, demanda Carhaix dont la face blême s’éclairait, tandis que ses gros yeux de chien s’emplissaient d’eau. Visiblement, il jubilait, heureux de se trouver à table avec des amis, bien au chaud, dans sa tour.

— Mais, videz donc vos verres, vous ne buvez point, dit-il, en élevant son pot à cidre.

— Voyons, des Hermies, tu prétendais hier que le Satanisme ne s’était jamais interrompu depuis le Moyen Âge, reprit Durtal, voulant entrer enfin dans cette conversation qui le hantait.

— Oui, et les documents sont irréfutables ; je te mettrai à même quand tu le voudras, de les prouver.

À la fin du xve siècle, c’est-à-dire au temps de Gilles De Rais, — pour ne pas remonter plus haut — le Satanisme prit les proportions que tu sais ; au