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Où veut-elle en venir, car enfin elle a un but ! — Elle ne veut pas aboutir à l’acte même. Craint-elle, ainsi qu’elle l’affirme, la désillusion ? se rend-elle compte combien les soubresauts amoureux sont grotesques ? ou bien est-elle, ce que je crois, une mélancolique et terrible allumeuse qui ne songe qu’à elle ; ce serait alors une sorte d’égoïsme obscène, un de ces péchés compliqués tels qu’en contient la Somme des confesseurs… Dans ce cas, elle serait une… frôleuse !

Puis reste cette question de l’incubat qui vient se enter là-dessous ; elle avoue, et cela si placidement, qu’elle cohabite à volonté, en songe, avec des êtres vivants ou morts ? est-elle satanisante et le chanoine Docre, qui l’a connue, a-t-il passé par là ?

Autant de questions impossibles à résoudre. Que dénonce maintenant cette invitation imprévue pour demain ? veut-elle ne céder que chez elle ? s’y trouve-t-elle plus à l’aise ou juge-t-elle plus urticant le péché commis près de son mari, dans une chambre ? Exècre-t-elle Chantelouve, est-ce une vengeance méditée ou compte-t-elle sur la peur du danger pour se fouetter les sens ?

Après cela, c’est peut-être tout bonnement une dernière coquetterie, une halte de scrupules, un apéritif avant le repas ; puis les femmes sont si drôles ! elle s’est peut-être assigné des délais, pour se mieux différencier, par ce subterfuge, des