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— Ah ! Je sais bien que ça ne te plaît pas à toi que je fasse la grasse matinée, dit-il, s’adressant à son chat qui, étendu sur la courte-pointe, à ses pieds, le regardait fixement avec des yeux très noirs.

Cette bête était affectueuse et câline, mais maniaque et retorse ; elle n’admettait aucune fantaisie, aucun écart, entendait que l’on se levât et que l’on se couchât à la même heure ; et, très nettement elle faisait, lorsqu’elle était mécontente, passer, dans la sombreur de son regard, des nuances irritées, sur le sens desquelles son maître ne se trompait point.

Rentrait-il avant onze heures du soir, elle l’attendait dans le vestibule, à la porte, griffait le bois, miaulait avant même qu’il n’eût pénétré dans la pièce ; puis elle roulait de langoureuses prunelles d’or vert, se frottait contre ses culottes, sautait sur les meubles, se dressait tout debout, simulant le petit cheval qui se cabre, lui envoyait lorsqu’il s’approchait, par amitié, de grands coups de tête ; passé onze heures, elle n’allait plus au devant de lui, se bornait à se lever alors qu’il arrivait près d’elle, faisait encore le gros dos, mais ne caressait pas ; plus tard encore, elle ne bougeait et elle se plaignait et grognait, s’il se permettait de lui lisser le dessus de la tête ou de lui gratter le dessous du cou.