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que vous éprouviez à ne pas vous croire suffisamment imprégné de l’atmosphère temporale ; vous vous demandiez si la routine n’annihilait pas l’efficace de vos oraisons ? Vous chercherez donc toujours à liarder avec vous-même ! Mais, voyons, je vous connais assez pour savoir que, cette nuit, vous tressaillerez d’aise, rien qu’en entendant l’admirable invitatoire de l’office. Avez-vous donc besoin de vous appesantir sur chaque mot, de soupeser chaque répons ? Ne sentez-vous pas la présence de Dieu, en cet enthousiasme qui n’a rien à démêler avec la discussion et l’analyse ? Ah ! Vous n’êtes pas simple avec lui ! Vous aimez mieux que personne les proses inspirées des heures et vous voulez vous convaincre que vous ne raisonnez pas assez pour les aimer. C’est fou ! Vous n’aboutirez, avec de tels soupçons, qu’à vous briser tout élan ; et prenez garde, car c’est la maladie du scrupule — dont vous avez tant souffert à la Trappe — qui revient !

Soyez donc meilleur enfant avec vous-même et moins pincé avec Dieu. Il n’exige pas que vous démontiez, ainsi que des pièces d’horlogerie, les sujets de vos suppliques et que vous vous chantourniez l’entendement quand vous commencez de les dire. Il vous mande seulement de les réciter ; tenez, un exemple ; choisissons une sainte dont vous ne récuserez pas la compétence, sainte Térèse ; elle ignorait le latin et ne souhaitait point que ses filles l’apprissent ; et les Carmélites psalmodient cependant l’office en cette langue. Avec la minutie de vos conjectures, elles prieraient mal, alors ! La vérité est qu’elles savent, qu’en agissant de la sorte, elles chantent les louanges du seigneur et l’implorent