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ainsi dire, les échéances diaboliques imposées à des âmes insolvables dont ils paient de la sorte intégralement les dettes.

— C’est égal, avait fait Durtal, en hochant la tête, pour consentir à attirer ainsi sur soi les attaques destinées au prochain, il faut être joliment certain de ne pas sombrer ?

— Les religieuses choisies par Notre Seigneur, comme victimes expiatoires, comme holocaustes, sont, en somme, assez rares, avait repris l’abbé ; elles sont, généralement, dans ce siècle surtout, obligées de se réunir, de se coaliser, afin de supporter sans faiblir le poids des méfaits qui les tentent, car, pour qu’une âme puisse subir, à elle seule, les assauts sataniques qui sont parfois atroces, il faut qu’elle soit vraiment assistée par les anges et élue par Dieu… et après un silence, le vieux prêtre avait ajouté :

— Je crois pouvoir parler avec une certaine expérience de ces questions, car je suis l’un des directeurs des religieuses réparatrices dans les couvents.

— Et quand on pense que le monde se demande à quoi servent les ordres contemplatifs ! s’était écrié Durtal.

— Ils sont les paratonnerres de la société, avait dit, avec une singulière énergie, l’abbé. Ils attirent sur eux le fluide démoniaque, ils résorbent les séductions des vices, ils préservent par leurs prières ceux qui vivent dans le péché comme nous ; ils apaisent enfin la colère du Très-Haut et l’empêchent de mettre en interdit la terre. Ah ! Certes, les sœurs qui se vouent à la garde des malades et des infirmes sont admirables, mais combien leur