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actuelle, qu’à aller de l’avant, eh bien, je suis encore arrêté, car le dernier obstacle à franchir m’effare.

Jusqu’ici, j’ai pu marcher seul, sans une aide terrestre, sans un conseil ; j’ai pu me convertir, sans l’appui de personne, mais aujourd’hui, je ne puis plus faire un pas sans avoir un guide. Je ne puis m’approcher de l’autel, sans le secours d’un truchement, sans le renfort d’un prêtre.

Et une fois de plus, il reculait, car il avait autrefois fréquenté un certain nombre d’ecclésiastiques et il les avait trouvés si médiocres, si tièdes, surtout si hostiles à la Mystique, qu’il se révoltait rien qu’à l’idée de leur exposer le bilan de ses postulations et de ses regrets.

Ils ne me comprendront pas, se disait-il, ils me répondront que la mystique était intéressante au Moyen Age, qu’elle est maintenant désuète, qu’elle est, en tout cas, en parfait désaccord avec le modernisme. Ils croiront que je suis fou, m’assureront d’ailleurs que Dieu n’en demande pas tant, m’engageront, en souriant, à ne pas me singulariser, à faire comme les autres, à penser comme eux.

Je n’ai certes pas la prétention d’aborder, de moi-même, la voie mystique, mais enfin qu’ils me laissent au moins l’envier, qu’ils ne m’infligent pas leur idéal bourgeois d’un Dieu !

Car, il n’y a pas à se leurrer, le Catholicisme n’est point seulement cette religion tempérée qu’on nous propose ; il ne se compose pas seulement de petites cases et de formules ; il ne réside pas en entier dans d’étroites pratiques, dans des amusettes de vieille fille, dans toute