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sauter le fossé, à me confesser et à communier, il resterait toujours à résoudre la terrible question des sens ; il faudrait se déterminer à fuir les emprises de la chair, à renoncer aux filles, à accepter un éternel jeûne. Ça, je n’y parviendrai jamais !

Sans compter que, dans tous les cas, le moment serait mal choisi si je tentais dès maintenant cet effort, car je n’ai jamais été si tourmenté que depuis ma conversion ; ah ! ce que le catholicisme suscite d’immondes rumeurs lorsque l’on rôde dans ses alentours, sans y entrer !

Et à cette exclamation une autre répliquait aussitôt : Eh bien mais alors, il faut y entrer !

Il s’irritait à tourner ainsi sur lui-même, sans changer de place et il essayait de dévier cette conversation, comme s’il se fût entretenu avec une autre personne dont les questions l’embarrassaient ; mais il y revenait quand même et, agacé, réunissait toute sa raison, l’appelait à l’aide.

Voyons, il faut tâcher de se repérer pourtant ! Il est évident que depuis que je me suis approché de l’Église, mes persuasions d’ordures sont devenues plus fréquentes et plus tenaces ; un autre fait est certain encore, c’est que je suis suffisamment usé par vingt ans de noce pour n’avoir plus de besoins charnels. Je pourrais donc parfaitement, en somme, si je le voulais bien, demeurer chaste ; mais il faudrait ordonner à ma misérable cervelle de se taire et je n’en ai pas la force ! — C’est effrayant tout de même, dire que je suis plus attisé que dans ma jeunesse, car maintenant mes désirs voyagent et, las de l’abri coutumier, ils partent à la recherche du mauvais gîte ! Comment expliquer cela ? ne s’agirait-il pas alors