Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/61

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

réchauffé par le bain-marie d’un faux zèle. Je ne veux pas de compromis et de trêves, d’alternances de débauches et de communions, de relais libertins et pieux, non, tout ou rien ; se muer de fond en comble ou ne rien changer !

Et aussitôt, il reculait épouvanté, essayait de fuir devant ce parti qu’il s’agissait de prendre, s’ingéniait à se disculper en ergotant pendant des heures, invoquait les plus piètres motifs pour demeurer tel qu’il était, pour ne pas bouger.

Comment faire ? si je n’obéis pas à des ordres que je sens s’affirmer, de plus en plus impérieux, en moi, je me prépare une vie de malaises et de remords, car je sais très bien que je ne dois pas m’éterniser ainsi sur le seuil, mais pénétrer dans le sanctuaire et y rester. Et si je me décide… ah ! Non, par exemple… car alors il faudra s’astreindre à un tas d’observances, se plier à des séries d’exercices, suivre la messe le dimanche, faire maigre le vendredi ; il faudra vivre en cagot, ressembler à un imbécile !

Et il se rappelait soudain, pour s’aider à la révolte, la dégaîne, la tête, des gens assidus dans les églises ; pour deux hommes qui avaient l’air d’êtres intelligents, d’êtres propres, combien, à n’en pas douter, étaient des cafards et des pleutres !

Presque tous avaient l’aspect louche, la voix huileuse, les yeux rampants, les lunettes inamovibles, les vêtements en bois noir des sacristains ; presque tous égrenaient d’ostensibles chapelets et, plus stratégiques, plus fourbes encore que les impies, ils rançonnaient leur prochain, en quittant Dieu.