Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/425

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


— Qu’est-ce qui lui prend ?

— Il lui prend que la couleur blanche de ma robe l’exaspère.

— Ah ! et pourquoi ?

— Je ne sais ; il veut peut-être être le seul qui soit blanc, ici ; il épargne les convers, mais dès qu’un père… tenez, vous allez voir.

Et l’hôtelier se dirigea tranquillement vers le cygne.

— Viens, dit-il à la bête irritée qui l’éclaboussa d’eau ; et il tendit la main que le cygne happa.

— Voilà, fit le moine, en montrant la marque d’une pince rouge imprimée dans sa chair.

Et il sourit, en se tenant la main et quitta Durtal qui se demanda si, en procédant de la sorte, le trappiste n’avait pas voulu s’infliger une punition corporelle pour expier une distraction quelconque, une vétille.

Ce coup de bec a dû le tenailler atrocement, car les larmes lui sont montées aux yeux. Comment s’est-il exposé si joyeusement à cette morsure ?

Et il se souvenait qu’un jour, à l’office de None, un des jeunes moines s’était trompé dans le ton d’une antienne ; au moment où se terminait l’office, il s’était agenouillé devant l’autel, puis il s’était étendu sur les dalles tout de son long, à plat ventre, la bouche collée au sol, jusqu’à ce que la cliquette du prieur lui eût intimé l’ordre de se relever.

C’était la coulpe volontaire, pour une négligence commise, pour un oubli. Qui sait si le P. Etienne ne s’était pas, à son tour, châtié d’une pensée qu’il jugeait peccamineuse, en se faisant ainsi pincer ?