Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/404

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cette absoute provisoire d’une mort représentée, elle-même, par le sommeil !

Et si, de ces textes si savamment triés, de ces proses si solidement scellées, Durtal passait à la robe sacerdotale de leurs sons, à ces chants neumatiques, à cette divine psalmodie, toute uniforme, toute simple, qu’est le plain-chant, il devait constater que, sauf dans les cloîtres Bénédictins, on lui avait partout adjoint un accompagnement d’orgue, on l’avait enfourné de force dans la tonalité moderne et il disparaissait sous ces végétations qui l’étouffaient, devenait partout incolore et amorphe, incompréhensible.

Un seul de ses bourreaux, Niedermeyer, s’était au moins montré pitoyable. Lui, avait essayé d’un système plus ingénieux et plus probe. Il avait renversé les termes du supplice. Au lieu de vouloir assouplir le plain-chant et le fourrer dans le moule de l’harmonie moderne, il avait contraint cette harmonie à se ployer à la tonalité austère du plain-chant. Il conservait ainsi son caractère, mais combien il eût été plus naturel de le laisser solitaire, de ne pas l’obliger à remorquer un inutile cortège, une maladroite suite !

Ici au moins, à la Trappe, il vivait, s’épanouissait, en toute sécurité, sans traîtrises de la part de ces moines. Il y avait toujours homophonie, toujours on le chantait, sans accompagnement, à l’unisson.

Cette vérité, il put se la confirmer, une fois de plus, après le souper, le soir, alors qu’à la fin des Complies, le père sacristain alluma tous les cierges de l’autel.

À ce moment, dans le silence, ces trappistes à genoux, la tête dans leurs mains ou la joue penchée sur la manche