Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/356

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec l’abbé de la Trappe, a décidé qu’elle me serait propice ; je n’ai donc rien à me reprocher, je suis indemne.

— Cela prouve-t-il que tu n’aurais pas mieux agi, en vivant cette journée en prières, dans l’église ?

— Mais, se cria-t-il, avec ce système-là, on ne marcherait plus, on ne mangerait plus, on ne dormirait plus, car on ne devrait jamais s’éloigner de l’église. Il y a temps pour tout, que diantre !

— Sans doute, mais une âme plus diligente eût refusé cette excursion, justement parce qu’elle lui plaisait ; elle l’eût écartée, par mortification, par esprit de pénitence.

— Evidemment mais… ces scrupules le torturèrent ; le fait est, se dit-il, que j’aurais pu employer mon après-midi plus saintement ; — de là, à croire qu’il s’était mal conduit, il n’y avait qu’un pas et il le fit. Il se lapida, pendant une heure, suant d’angoisse, s’accusant de méfaits imaginaires, s’engageant dans cette voie si loin qu’il finit par s’ébrouer, par comprendre qu’il déraillait.

L’histoire du chapelet lui revint en mémoire et alors il se blâma de se laisser encore acculer par le démon. Il commençait à souffler, à reprendre son assiette, quand des attaques autrement redoutables se présentèrent.

Ce ne fut plus une instillation d’arguments qui coulaient goutte à goutte, mais une pluie furieuse qui se précipita sur son âme, en avalanche. L’orage, dont l’ondée de scrupules n’était que le prélude, éclata en plein ; et, dans la panique du premier moment, dans l’assourdissement de la tempête, l’ennemi démasqua ses batteries, le frappa au cœur.

— Il n’avait retiré aucun bien de cette communion,