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et solennelle fierté de cette phrase mélodique qui invoque alors le Christ sans alarmes et sans pleurs.

La messe se termine, le célébrant disparaît et, de même qu’au moment où le mort entra, le clergé, précédé par les suisses, s’avance vers le cadavre, et, dans le cercle enflammé des cierges, un prêtre en chape profère les puissantes prières des absoutes.

Alors, la liturgie se hausse, devient plus admirable encore. Médiatrice entre le coupable et le Juge, l’Eglise, par la bouche de son prêtre, adjure le Seigneur de pardonner à la pauvre âme : — « Non intres in judicium cum servo tuo, Domine… » — ; puis, après l’Amen, lancé par l’orgue et toute la maîtrise, une voix se lève dans le silence et parle au nom du mort :

« Libera me… »

Et le chœur continue le vieux chant du Xe siècle. Ainsi que dans le Dies irae qui s’appropria des fragments de ces plaintes, le Jugement dernier flamboie et d’impitoyables répons attestent au trépassé la véracité de ses trances, lui confirment qu’à la chute des temps, le Juge viendra, dans le hourra des foudres, châtier le monde.

Et le prêtre fait à grands pas le tour du catafalque, le brode de perles d’eau bénite, l’encense, abrite la pauvre âme qui pleure, la console, la prend contre lui, la couvre, en quelque sorte, de sa chape et il intervient encore pour qu’après tant de fatigues et de peines, le Seigneur permette à la malheureuse de dormir, loin des bruits de la terre, dans un repos sans fin.

Ah ! jamais, dans aucune religion, un rôle plus charitable, une mission plus auguste, ne fut réservé à un