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prière n’est jamais vaine, que presque aussitôt l’objet égaré se retrouve.

Mais, continua l’abbé, puisque vous aimez tant ce monastère, allez-y, surtout lorsqu’il resplendit.

Et le prêtre se leva et prit une Semaine religieuse qui traînait sur sa table.

Il la feuilleta. Tenez, dit-il, et il lut : « Dimanche, à trois heures, vêpres chantées ; cérémonie de vêture, présidée par le Révérendissime Père Dom Étienne, abbé de la Grande Trappe, et Salut. »

— Le fait est que voilà une cérémonie qui m’intéresse !

— J’irai probablement aussi.

— Alors, nous pourrions nous rejoindre dans la chapelle.

— Parfaitement.

— Les prises d’habits n’ont plus aujourd’hui la gaieté qu’elles avaient au XVIIIe siècle, dans certains instituts de Bénédictines, entre autres dans l’abbaye de Bourbourg, en Flandre, reprit l’abbé, en souriant, après un silence.

Et comme Durtal l’interrogeait du regard.

— Mais oui, c’était sans tristesse ou c’était du moins d’une tristesse bien spéciale, jugez-en. La veille du jour où la postulante devait prendre l’habit, elle était présentée à l’abbesse du Bourbourg par le gouverneur de la ville. On lui offrait du pain et du vin et elle y goûtait dans l’église même. Le lendemain, elle se rendait, vêtue d’habits magnifiques, dans un bal où se tenait toute la communauté des religieuses et, là, elle dansait, puis elle demandait à ses parents de la bénir et elle était conduite, au son des violons, dans la chapelle où l’abbesse prenait possession d’elle. Elle avait, pour la dernière fois,