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dans toutes les Trappes et aussi dans d’autres ordres. J’en connais personnellement un autre qui me reporte, lorsqu’il m’est permis de l’aborder, au temps de saint François d’Assise. Celui−là vit, en extase, le chef ceint comme d’une auréole, par un nimbe d’oiseaux.

Les hirondelles viennent nicher au−dessus de son grabat, dans la loge de frère−portier qu’il habite ; elles tournoient gaiement autour de lui et les toutes petites qui s’essaient à voler se reposent sur sa tête, sur ses bras, sur ses mains, tandis qu’il continue de sourire, en priant.

Ces bêtes se rendent évidemment compte de cette sainteté qui les aime et les protège, de cette candeur que, nous les hommes, nous ne concevons plus ; il est bien certain que, dans ce siècle de studieuse ignorance et d’idées basses, le frère Siméon et ce frère−portier paraissent invraisemblables ; pour ceux−ci, ils sont des idiots et pour ceux−là, des fous. La grandeur de ces convers admirables, si vraiment humbles, si vraiment simples, leur échappe !

Ils nous ramènent au Moyen Âge, et c’est heureux ; car il est indispensable que de telles âmes existent, pour compenser les nôtres ; ils sont les oasis divines d’ici−bas, les bonnes auberges où Dieu réside, alors qu’Il a vainement parcouru le désert des autres êtres.

N’en déplaise aux gens de lettres, ces personnages sont aussi véridiques que ceux qui se profilent dans mes précédents livres ; ils vivent dans un monde que