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Norine entra avec un seau fumant de vin.

— Vous n’avez pas mis d’avoine dedans ? demanda le berger.

— Non, mon homme.

— C’est ben alors, parce que, voyez-vous, ça échauffe ; du chènevis si vous en avez, mais pas d’avoine. — Et l’on approcha le seau de la bête remise sur pattes et dont la vulve saignait des stalactites de morves roses.

La Lizarde lapa le vin d’un trait. Alors Norine s’agenouilla et se mit à la traire ; elle avait l’air de sonner les cloches et les mamelles fusaient, sous ses doigts humectés par une goutte de lait, une boue jaune bouillonnée de mousse.

— Tiens, bois, fit-elle, à la vache qui avala, en deux coups de langue, la purée de ses pis.

— Pour un beau veau, c’est un beau veau, dit le berger, en étanchant ses doigts avec un bouchon de paille ; la tante Norine demeurait en extase, les mains tombées sur le ventre et jointes.

La vache se remit à mugir.

— Ah çà, t’as pas fini de gueuler comme ça, chameau ! clama Norine. — Fous-y donc sur le museau, à cette carne-là ! reprit l’oncle qui s’essuyait le front d’un revers de manche.

Il n’y avait plus de « fanfan » et de « fifille », plus d’appellations amoureuses, plus d’encourage-