Page:Huysmans - En rade.djvu/62

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Mais oui… et l’oncle Antoine ?

— Il travaille dans la cour à cette heure, il fait le rain.

— Il fait quoi ?

— Le rain.

Devant la mine ahurie de Jacques, la tante Norine s’esclaffa. — Mais oui, il fait avec du grès le chaudron qu’est sale.

Jacques finit par comprendre. — L’airain, fit-il.

— Oui, le rain, c’est en quoi qu’il est le chaudron.

— Et votre vache qui est grosse ?

— M’en parle pas, m’en parle pas, mon garçon ; pauvre bête, quand j’y pense, ça lui travaille, ça lui tire, mais ça ne pousse pas encore. Je m’en vas, car, vois-tu, faut que j’aille chez le berger, par rapport à elle.

Et elle reprit son chemin, droite sous son chapeau de paille, plate sous son canezou, les reins martialement cahotés par son pas militaire, les coudes tremblant sous l’effort de la brouette qui la précédait dans sa marche.

— À tout à l’heure, tiens, là. — et d’un mouvement de tête elle lui indiquait un petit sentier à suivre au bout duquel il entrevit, en effet, dans une mare de soleil, l’oncle Antoine qui récurait un chaudron de cuivre.