Page:Huysmans - En rade.djvu/59

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tion des idées si ténue que son fil échappait à l’analyse, un fil souterrain fonctionnant dans l’obscurité de l’âme portant l’étincelle, éclairant tout d’un coup ses caves oubliées, reliant ses celliers inoccupés depuis l’enfance ? Les phénomènes du rêve avaient-ils avec les phénomènes de l’existence vive une parenté plus fidèle qu’il n’était permis à l’homme de le concevoir ? Était-ce tout bonnement une inconsciente et subite vibration des fibres de l’encéphale, un résidu d’activité spirituelle, une survie de cerveau créant des embryons de pensées, des larves d’images, passés par la trouble étamine d’une machine mal arrêtée, mâchant dans le sommeil à vide ?

Fallait-il enfin admettre des causes surnaturelles, croire aux desseins d’une Providence incitant les incohérents tourbillons des songes, et accepter du même coup les inévitables visites des incubes et des succubes, toutes les lointaines hypothèses des démonistes, ou bien convenait-il de s’arrêter aux causes matérielles, de rapporter exclusivement à des leviers externes, à des troubles de l’estomac ou à d’involontaires mouvements du corps, ces divagations éperdues de l’âme ?

Il importait, dans ce cas, de ne point douter des prétentions à tout expliquer de la science, de se convaincre, par exemple, que les cauchemars sont