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autres, dans le répugnant baquet des foules !

Et puis, en admettant même qu’il s’habituât à l’agitation d’une vie pauvre, que deviendrait-il avec Louise ? Il se la figura, malade, impotente, se représenta les abominables conséquences des ataxies, les chaises spéciales, les toiles cirées, les alèzes, les linges, toute l’horreur des corps inertes qu’il faut servir ; je ne pourrai même point la conserver avec moi, puisque je n’ai pas les moyens de payer une bonne. Il sera donc nécessaire que je la place dans un hospice ! Cette pensée lui fut si cruelle que ses larmes coulèrent.

C’est pourtant inutile de se désespérer ainsi, à l’avance ! enfin, quand bien même Louise reviendrait à la santé, est-ce que les attaches qui nous reliaient ne sont point rompues ? Nous nous sommes trop froissés ici pour que jamais le souvenir de nos mésestimes se perde ! non, c’est bien fini ; quoi qu’il arrive, la tranquillité de nos vies est morte !

Mais, voyons, reprit-il, en s’essuyant les yeux ; ce n’est pas tout cela ; nous partons dans quelques heures et il s’agit de préparer les malles.

Il remonta dans sa chambre, trouva sa femme levée, pliant ses robes.

— Ah ! si je n’avais pas ce chat, je serais vraiment heureuse de rejoindre Paris.