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constances aidèrent à détourner la brouille. Las de vivre seuls, Jacques et Louise s’avancèrent vers Norine et l’oncle, les fréquentèrent, et le besoin que les vieux éprouvaient de se plaindre de leur sort, de vanter leurs travaux, décida de leur accueil dont la gracieuseté s’amplifia, car les saletés qu’on inflige aux gens déterminent d’abord, chez ceux qui les commettent, un petit recul, puis un mouvement en sens inverse, un désir de palliatif, un abandon de patte douce, sans doute destinés à cacher de futures trappes.

Jacques fut heureux que les choses n’eussent pas tourné plus mal, car sa période d’engourdissement, sa torpeur de grand air avaient pris fin, l’ennui l’accablait ; forcément, il songeait, en les regrettant, à ses travaux, à ses livres, à sa vie de Paris, à ces alentours apéritifs dont le charme s’exagérait depuis qu’il ne le subissait plus.

Puis la grande chaleur éclata ; le temps incertain depuis quelques jours s’affermit. Écalé de ses nuages, le ciel arda, nu, d’un bleu cru, féroce, inonda la campagne de flammes, désola la plaine. Le sol se dessécha, jaunit comme une terre à poêle, les buttes altérées se fendirent ; sous des trognons poussiéreux d’herbes, les routes rissolées pelèrent.

Ainsi que la plupart des gens nerveux, Jacques