lls étaient arrivés sur la terrasse et ils se promenaient de long en large.
Ils passaient et repassaient sans cesse devant deux statues. Cyprien dissimulait mal le dégoût qu’elles lui inspiraient. Il s’arrêtait devant, contemplait avec des gestes excessifs une Anne d’Autriche, portant dans une main, un papier roulé, une serviette à musique pour jeune fille et, dans l’autre, un sceptre semblable à ces gratte-dos qu’on vend chez les tablettiers et les parfumeurs. Elle était soufflée, avait des poches sous les yeux, l’air grognon, ne possédait ni gorge, ni derrière, semblait, en fin de compte, une reine de lavoir qui ne serait pas encore soûle.
L’autre arborait peut-être un port, moins imposant et une mine plus canaille, s’il était possible. Étiquetée : « Anne de Bretagne, reine de France, 1476-1514 » , elle tenait une corde entre de grands doigts gonflés et mous comme des boudins blancs ; pas plus de gorge et de derrière que la précédente. Avec son pif en trompette, ses lèvres en rebord de vase, son ventre mastoc et son allure arsouille, on l’eût prise pour une marinière qui va haler une barque.
— Ce n’est toujours pas avec des bergères comme celles-là qu’on corrompra la jeunesse qui rôde ici, dit Cyprien. Ce sont des bobonnes de maisons suspectes ces princesses-là – Il regarda, sur les socles, les noms des sculpteurs, fut étonné qu’ils ne portassent point la signature de Maindron, jugea ces œuvres dignes de l’auteur de Velléda, une statue vraiment surprenante.