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Les médecins consultés l’effrayèrent. Il était temps d’enrayer cette vie, de renoncer à ces manœuvres qui alitaient ses forces. Il demeura, pendant quelque temps, tranquille ; mais bientôt le cervelet s’exalta, appela de nouveau aux armes. De même que ces gamines qui, sous le coup de la puberté, s’affament de mets altérés ou abjects, il en vint à rêver, à pratiquer les amours exceptionnelles, les joies déviées ; alors, ce fut la fin ; comme satisfaits d’avoir tout épuisé, comme fourbus de fatigues, ses sens tombèrent en léthargie, l’impuissance fut proche.

Il se retrouva sur le chemin, dégrisé, seul, abominablement lassé, implorant une fin que la lâcheté de sa chair l’empêchait d’atteindre.

Ses idées de se blottir, loin du monde, de se calfeutrer dans une retraite, d’assourdir, ainsi que pour ces malades dont on couvre la rue de paille, le vacarme roulant de l’inflexible vie, se renforcèrent.

Il était d’ailleurs temps de se résoudre ; le compte qu’il fit de sa fortune l’épouvanta ; en folies, en noces, il avait dévoré la majeure partie de son patrimoine, et l’autre partie, placée en terres, ne rapportait que des intérêts dérisoires.

Il se détermina à vendre le château de Lourps où il n’allait plus et où il n’oubliait derrière lui aucun souvenir attachant, aucun regret ; il liquida aussi ses autres biens, acheta des rentes sur l’État, réunit de la sorte un revenu annuel de cinquante mille livres et se