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reparurent, établissant par eux-mêmes, le pensionnat, la chapelle, où ils avaient retenti, répercutant leurs hallucinations aux organes olfactifs et visuels, les voilant de fumée d’encens et de ténèbres irradiées par des lueurs de vitraux, sous de hauts cintres.

Chez les Pères, les cérémonies religieuses se pratiquaient en grande pompe ; un excellent organiste et une remarquable maîtrise faisaient de ces exercices spirituels un délice artistique profitable au culte. L’organiste était amoureux des vieux maîtres et, aux jours fériés, il célébrait des messes de Palestrina et d’Orlando Lasso, des psaumes de Marcello, des oratorios de Hændel, des motets de Sébastien Bach, exécutait de préférence aux molles et faciles compilations du père Lambillotte si en faveur auprès des prêtres, des « Laudi spirituali » du xvie siècle dont la sacerdotale beauté avait mainte fois capté des Esseintes.

Mais il avait surtout éprouvé d’ineffables allégresses à écouter le plain-chant que l’organiste avait maintenu en dépit des idées nouvelles.

Cette forme maintenant considérée comme une forme caduque et gothique de la liturgie chrétienne, comme une curiosité archéologique, comme une relique des anciens temps, c’était le verbe de l’antique Église, l’âme du moyen âge ; c’était la prière éternelle chantée, modulée suivant les élans de l’âme, l’hymne permanente élancée depuis des siècles vers le Très-Haut.

Cette mélodie traditionnelle était la seule qui, avec