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aux penchants de des Esseintes qui, par les jours de brume, par les jours de pluie, s’enfermait dans le retrait imaginé par ce poète et se grisait les yeux avec les chatoiements de ses étoffes, avec les incandescences de ses pierres, avec ses somptuosités, exclusivement matérielles, qui concouraient aux incitations cérébrales et montaient comme une poudre de cantharide dans un nuage de tiède encens vers une Idole Bruxelloise, au visage fardé, au ventre tanné par des parfums.

À l’exception de ces poètes et de Stéphane Mallarmé, qu’il enjoignit à son domestique de mettre de côté, pour le classer à part, des Esseintes n’était que bien faiblement attiré par les poètes.

En dépit de sa forme magnifique, en dépit de l’imposante allure de ses vers qui se dressaient avec un tel éclat que les hexamètres d’Hugo même semblaient, en comparaison, mornes et sourds, Leconte de Lisle ne pouvait plus maintenant le satisfaire. L’antiquité si merveilleusement ressuscitée par Flaubert, restait entre ses mains immobile et froide. Rien ne palpitait dans ses vers tout en façade que n’étayait, la plupart du temps, aucune idée ; rien ne vivait dans ces poèmes déserts dont les impassibles mythologies finissaient par le glacer. D’autre part, après l’avoir longtemps choyée, des Esseintes arrivait aussi à se désintéresser de l’œuvre de Gautier ; son admiration pour l’incomparable peintre qu’était cet homme, était allée en se dissolvant de jours en jours, et maintenant il demeurait